Objectif

Le projet À contre-courant Ki mua ki te kōpape relève le challenge de vivre seul sur un atoll inhabité du Pacifique, d’observer la nature et de rapporter le témoignage d’un environnement en sursis.

Après 20 ans à étudier l’environnement des îles du Pacifique suivant des approches conventionnelles, je ressens le besoin de sortir des sentiers battus. Aujourd’hui, j’ai décidé de m’engager dans une expédition scientifique inédite, en totale immersion.

Seul pendant 8 mois, face aux éléments, je vais délibérément me placer dans une situation de vulnérabilité. L’expédition débutera en avril 2024.

Mes objectifs ?

• Observer une faune sauvage menacée de disparition par le dérèglement climatique et les impacts des hommes ;

• Inciter à agir pour préserver ces îles à la dérive. 

Trois dimensions

Aventure et survie

Le projet s’inscrit dans une démarche engagée, non pour le plaisir de prendre des risques mais par nécessité. Mener seul une expédition sur un atoll inhabité de manière permanente permet d’observer une faune exceptionnelle en limitant son dérangement. Rester plus de 200 jours permet une étude approfondie du Titi et des pressions qui pèsent sur cet oiseau menacé d’extinction.

Mais, au-delà du paysage de carte postale, la vie sur un atoll est austère et parfois dure : aucune source d’eau, des UV extrêmes, aucun poste de secours dans les environs, 100 % d’humidité, de l’air salin corrosif…

Vivre sur un atoll impose donc de se préparer en amont de l’expédition et s’adapter une fois sur place. Tout d’abord satisfaire les besoins essentiels et immédiats, autrement l’aventure s’arrêterait-là ! Boire, manger, s’abriter, se soigner. 

Concrètement il s’agira de savoir récupérer et produire de l’eau douce par différents moyens, de pêcher même si la mer est mauvaise, de reconnaître les algues et les rares plantes comestibles, d’éviter le venin des poissons, de soigner une plaie avant qu’elle ne s’infecte, de construire un faré résistant aux dépressions tropicales et surélevé en cas de raz-de-marée…

Un autre challenge : la solitude. Une semaine, un mois sans voir personne peut sembler long pour certains. Ici, il s’agit de tenir environ 8 mois ! Loin de la famille, des amis, de la société. La solitude est une drôle de compagnie qui porte parfois des coups au moral. Il faudra l’apprivoiser en acceptant les moments de grandes difficultés, les découragements car il y en aura sans aucun doute…

Science et conservation

On dénombre 400 atolls sur la planète dont près d’1/4 en Polynésie française. Mais ces atolls pourraient être rayés de la carte si la température du globe augmente de plus de 2°C provoquant la quasi disparition des écosystèmes coralliens qui le portent. En Polynésie française, le chevalier des Tuamotu est emblématique d’un milieu en sursis.

Appelé localement « Titi », cet oiseau terrestre, endémique de l’archipel, est très vulnérable face aux pressions humaines : la submersion de son îlot par les vagues, l’introduction de rats ou encore un incendie suffisent à le menacer voire le faire disparaît. Autrefois très commune, cette espèce curieuse et territoriale s’est rarifiée au point qu’il ne subsiste aujourd’hui plus que quelques centaines d’individus à l’échelle de la planète, dispersés sur quelques atolls des Tuamotu.

Ainsi, étudier le Titi, chercher à le protéger contre ces pressions d’origine humaine est une manière de « sauver l’atoll », d’œuvrer pour que les îles basses puissent exister au-delà du siècle.

Le projet À contre-courant ambitionne de collecter des informations sur le Titi et leurs îlots.

A l’aide d’observations visuelles, de capteurs, de drones, de caméras, les données recueillies porteront sur le recensement des Titi sur l’atoll. L’état de son habitat sera évalué, la présence de prédateurs introduits (rongeurs), l’érosion des îlots en lien avec la hauteur des vagues. Ces informations permettront de recommander les actions nécessaires pour préserver l’oiseau.

Transmettre et préserver

Raconter et transmettre les observations de la vie de cet atoll sera l’aboutissement du projet. Cette transmission aura pour support l’écriture et la prise d’images.

Les communications envisagées pourraient être des réunions publiques et conférences sur les atolls voisins habités et à Tahiti, un livre basé sur un « carnet de bord », des publications à caractère scientifique, un reportage photo donnant lieu à une exposition itinérante, un film. Soutenu par le conseil municipal, les communautés voisines, les propriétaires terriens de l’îlot qui servira de base-vie, le projet

À contre-courant porte l’ambition de contribuer à la préservation du patrimoine naturel exceptionnel de l’atoll.

En quête de sens

Aquarelle : Bertrand Juncker

Aquarelle : Bertrand Juncker

Œuvrant depuis 20 ans dans le suivi et la gestion de l’environnement, j’ai été aux premières loges pour l’observer se dégrader. Depuis la fin de mes études j’ai pris conscience de l’urgence climatique. Mais comme beaucoup, j’ai laissé la spirale du quotidien prendre le dessus. Habitudes, facilités… il y a bien des raisons de ne pas changer.

Aujourd’hui, au fond de moi, je ressens un besoin de changer de trajectoire, pour ne pas être submergé, anéanti par le climat. Et aussi par le poids des responsabilités. Arriverai-je à attendre dans quelques années : « pourtant Papa, tu savais… ».

« Commencez par changer en vous ce que vous voulez changer autour de vous » disait Gandhi. J’ai moi aussi le sentiment que ce changement doit passer par un engagement personnel. Le projet propose de renouer avec l’essentiel, de vivre avec les éléments, à contre-courant d’une société de consommation qui privilégie une vie d’apparence, une sécurité matérielle, de la surinformation…

Cette quête de sens m’amène à quitter ma famille, mes amis, une situation confortable. Je vais délibérément me placer en position de grande vulnérabilité pour vivre dans ma chair ce que peut ressentir, le Titi, ce petit oiseau terrestre sur son banc de sable. Seul, pendant plus de 200 jours sur un atoll dont le sommet culmine à 3 m au-dessus de l’océan, je devrai affronter comme le Titi les aléas climatiques. Une tempête, une forte houle, je prendrai alors la mesure de notre vulnérabilité face aux éléments.

J’aimerai rapporter de cette expédition des données scientifiques, des images inédites, un témoignage poignant de ce patrimoine en péril. Je souhaite encourager le public à réduire notre impact sur l’environnement, à agir pour préserver ces îles à la dérive.

Carte

L’expédition se déroulera au coeur du Pacifique Sud, en Polynésie française, dans l’archipel des Tuamotu.  Cet atoll isolé est inhabité de manière permanente. 

Départ depuis le 18 Avril 2024

Days
Hours
Minutes
Seconds

Jun-Nov 2023

Test et affinage des protocoles

Etude oiseaux, identification prédateurs, suivi hauteur des vagues

Sep-Oct 2023

Mission prospective (2 semaines)

Mise en œuvre des protocoles scientifiques. Apprendre à vivre en conditions réelles

Oct-Fev 2024

Achat matériel nécéssaire au terrain

Dessalinisateur, téléphone satellite, matériel de bivouac, kayak...

Jan-Fev 2024

Affrètement du matériel

Depuis la France, l’Australie, la Nouvelle-Calédonie jusqu’à Tahiti et aux Tuamotu

Mar-Avr 2024

Transfert et installation

Débarquement sur l’atoll, construction d’un faré, creusement d’un puit...

Avr-Nov 2024

Au coeur de l'expédition

Suivis environnementaux & expérience solitude (8 mois) Suivi des oiseaux, leurs habitats, leurs prédateurs (rongeurs)

Nov-Déc 2024

Retrait de la base vie

Récupération du matériel, démontage des installations...

Nov-Déc 2024

Compilation des informations recuellies

Analyse données et rédaction du rapport

Nov-Déc 2024

Commu-nication des résultats

Réunions publiques, conférences...

Partenaires

Cette aventure est rendue possible grâce au soutien de nombreux sponsors la municipalité, les communautés, la famille et les amis.

FAQ

L’expédition se déroule dans l’un des 76 atolls que compte l’archipel des Tuamotu. Mais je préfère garder confidentiel le nom de cette île ! Et même de dire  “n’y allez pas !”. Trop de sites extraordinaires et méconnus se sont retrouvés du jour au lendemain sur-fréquentés dès lors qu’une communication incitait à leur découverte.

Dans mon cas, soyons humbles, je ne pense pas que l’atoll sera assailli par des touristes en pèlerinage sur les lieux de cette robinsonnade. Mais pour minimiser le risque, parce qu’ “on ne sait jamais”, je garde le silence par respect pour les lieux. Pour consoler le curieux, je dirai “cet atoll ou un autre, la quête demeure la même : la solitude et la transmission des observations dans un objectif de sensibilisation”.

Si je vous dis qu’il y a 8 critères, vous me croiriez ? Oui, ça fait beaucoup et donc très peu de combinaisons idéales. C’est pour cette raison qu’il m’a fallu plusieurs mois pour choisir l’île.

 

En premier lieu j’ai choisi une île basse, un atoll, car j’aime cet univers de lumière, la vie à terre est simple, la vie sous-marine exubérante. Les atolls sont par ailleurs des sentinelles du changement climatique. Si nous ne changeons pas nos modes de vie, ce seront les premiers écosystèmes de la planète rayés de la carte, submergés par les flots. Dans un objectif de sensibilisation, mener l’expédition sur un atoll prend tout son sens.

 

Mais le choix d’une île ne peut porter que sur des critères géomorphologiques, esthétiques et environnementaux. Il faut considérer les dimensions sociale, culturelle, patrimoniale et foncière. Ainsi, après des rencontres et des échanges, j’ai obtenu l’aval du conseil municipal, de la population et des propriétaires fonciers de m’installer quelques mois pour vivre sur leur île.




J’ai tenté un classement de ces six critères par ordre d’importance décroissante

 

Accessible depuis la mer : il faut bien pouvoir y accéder. Et puis les lagons ouverts sur l’océan par des passes sont bien plus riches et intéressants à étudier que les lagons fermés.

 

Inhabitée ! Une des motivations de cette aventure est de ressentir l’isolement, la rupture avec le monde et ses moyens de communication. Peut-être des habitants d’îles voisines viendraient de temps à autre faire du coprah ou ramasser des crabes de cocotiers.

 

« Desservie » depuis une autre île habitée. Il faut imaginer que je puisse être secouru depuis une île proche habitée, située à quelques heures de navigation en bateau à moteur.

 

À la marge de sources de pollution. Je souhaite être au contact d’une nature préservée que je saurai respecter. L’atoll est éloigné des sites d’essais nucléaires, et n’a pas eu d’activité perlicoles intense. J’ai choisi une île particulièrement riche pour sa faune en oiseaux dont le fameux Titi, emblématique d’un milieu encore préservé mais hyper vulnérable.

 

Peu de ciguatéra. La chair de certains poissons et invertébrés marins peut contenir des toxines dont l’ingestion engendre la “gratte”, une intoxication avec des symptômes plus ou moins sévères en fonction de la dose et de l’individu, parmi lesquels des vomissements, démangeaisons, troubles neurologiques, troubles cardiovasculaires etc. Une telle intoxication signerait  la fin de mon expédition pour la simple raison que je pourrai plus me nourrir de produits de la mer alors qu’elle est mon seul moyen de subsistance. Les poissons de certaines îles sont réputés gratteux, d’autres moins. J’ai choisi aussi l’île en fonction de ce critère. Il me reste à bien sélectionner le poisson sur place !


Pas de nonos. Terrible ces insectes piqueurs ! Certains atolls en regorgent, y vivre doit être un véritable calvaire. Sur l’atoll que j’ai choisi, parmi les différents îlots qui la composent, j’en ai sélectionné un qui n’a pas de nono. Enfin, a priori !

Au début, je comptais partir 6 mois. Mais à la réflexion, j’ai craint que cette durée soit trop courte pour ressentir une pleine solitude et pour observer cet environnement sauvage. À l’inverse, une année entière d’ermitage est trop longue pour ma femme et nos filles encore jeunes. Et puis il y a les cyclones parfois dévastateurs et contre lesquels je serai bien démuni seul sur un banc de sable à 3 m d’altitude. Le gros de la période cyclonique courant de janvier à mars, j’ai trouvé le compromis de partir environ 8 mois, d’avril à décembre 2024.

Le projet vise à m’affranchir d’une société ultra connectée. Sur place, pas de surf, pas de réseaux sociaux, ni de Skype ou de WhatsApp. Juste un téléphone satellite pour rassurer la famille et une balise de détresse en cas de coup dur.

Raconter et transmettre les observations de la vie de cet atoll sera l’aboutissement de ce projet. Cette transmission aura pour support l’écriture et la prise d’images. Les réalisations envisagées pourraient être des réunions publiques et conférences sur les atolls voisins habités, sur Tahiti, un livre basé sur mon « carnet de bord », des publications à caractère scientifique, un reportage photo qui pourrait donner lieu à une exposition itinérante, et enfin un film.

Surtout pas ! 

 

Koh-Lanta est une épreuve de survie, dans un groupe. Pour ma part, je suis seul et le challenge de survie ne m’intéresse pas. Bien sûr, il faudra que je pêche, que je trouve de l’eau chaque jour, que je me soigne autrement ce beau projet va tourner court ! Mais cette dimension de survie n’est pas une fin, elle s’impose à moi. Je vais composer avec la nature, apprendre à vivre dans ce milieu austère, mais qui recèle des trésors de vie. Cette aventure est une donc expérience de solitude qui porte l’ambition de rapporter un témoignage poignant d’un environnement au bord de l’effondrement.

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